05 janvier 2023 | Points de vue | Lecture de 9 minutes

Une approche axée sur la valeur pour investir dans les actifs privés

Lorsque vous franchirez les portes de notre bureau, vous remarquerez une caricature accrochée au mur depuis la fondation de la société par Bill Wheeler et Murray Leith en 1982.

L’image représente un mouton se frayant poliment un chemin en sens inverse à travers un troupeau de semblables qui se précipitent aveuglément vers une falaise (« Excusez-moi! »), et rappelle constamment qu’il faut être prudent lorsqu’un secteur du marché devient populaire. La célèbre citation de Warren Buffet résume parfaitement cette règle fondamentale de l’investissement : « Ayez peur quand les autres sont avides, et soyez avide quand les autres ont peur » – et suivez le courant à vos risques et périls.

Cette philosophie a dicté nos placements ces 40 dernières années dans des portefeuilles équilibrés (obligations et actions traditionnelles) et, plus récemment, dans des actifs privés.

Quels sont les actifs privés qui complètent le mieux un portefeuille équilibré et comment choisir un fournisseur?

Il y a plus de six ans, nous avons commencé à étudier les occasions offertes par les actifs privés pour nos clients afin de mieux comprendre comment ils pouvaient s’intégrer à un portefeuille équilibré traditionnel. Les travaux de modélisation et de recherche que nous avons menés ont conclu que le secteur des infrastructures présentait les caractéristiques les plus complémentaires d’un portefeuille type de placements cotés en bourse, suivi de celui de l’immobilier privé, puis de la dette privée. Notre analyse dans ces domaines est également étayée par notre expérience de plusieurs décennies dans le suivi des entreprises immobilières cotées en bourse (FPI) et des sociétés du secteur des infrastructures – y compris Brookfield Asset Management à l’époque où elle était cotée en bourse sous le nom de Brascan.

Tout en estimant que le secteur des infrastructures convenait bien à nos clients, nous étions conscients que la catégorie d’actifs avait suscité un intérêt considérable au cours des dernières années et que la concurrence pour ces placements s’était considérablement accrue. Dans un domaine devenu très concurrentiel, nous avons jugé qu’il était essentiel de trouver un partenaire qui ne cherche pas principalement à rivaliser en termes de prix et qui puisse accéder à des offres grâce à des avantages concurrentiels parmi ses pairs. Parmi les fournisseurs, nous avons constaté que seuls quelques-uns possédaient l’expertise, les ressources et l’équipe nécessaires pour apporter une réelle valeur ajoutée aux projets dans lesquels ils investissaient.

Nous avons lancé notre première stratégie axée sur les actifs privés en mars 2019, le Leith Wheeler Infrastructure Fund Limited Partnership I, qui a donné à nos clients un accès au Brookfield Infrastructure Fund (BIF) IV, un fonds à capital fixe d’une durée de 12 ans. La société Brookfield a été sélectionnée pour les raisons suivantes :

  • Expérience : propriétaire et exploitant d’entreprises immobilières depuis plus de 100 ans.
  • Ensemble d’occasions : les réussites passées et la portée mondiale de la société lui permettent de rechercher des occasions dans les régions où elle assure une présence à l’échelle locale.
  • Antécédents solides : l’accent est mis sur le rendement total, ce qui permet d’acheter, d’améliorer et de vendre des actifs, contrairement à la plupart des autres fonds d’infrastructures qui achètent et conservent des actifs en se basant uniquement sur le rendement des revenus.
  • Gestion rigoureuse des prix : la société porte une attention au prix payé pour tout actif, ce qui, selon nous, favorise la résilience des rendements face à la hausse des taux d’intérêt. Les placements fondés sur la valeur offrent une marge de sécurité.
  • Ressources : la société dispose d’une main-d’œuvre de 30 000 personnes pour améliorer les projets. Sa taille lui permet d’être le propriétaire majoritaire de la plupart des projets et de mieux contrôler les résultats.
  • Harmonisation : la direction investit de manière significative aux côtés de ses investisseurs.

Nous avons poursuivi ce lancement réussi avec un fonds d’infrastructures à capital variable, le Leith Wheeler Infrastructure Fund II Limited Partnership fin 2019, qui investit dans Brookfield Super-Core Infrastructure Partners (BSIP).

Plus récemment, nous avons lancé notre Private Asset Fund (PAF) afin d’offrir aux investisseurs une exposition à diverses catégories d’actifs privés, telles que les infrastructures, l’immobilier, la dette privée et les prêts hypothécaires. Le PAF déploie de manière sélective des liquidités dans des stratégies lorsque nous estimons que l’occasion de placement est bonne, en s’appuyant sur notre propre philosophie axée sur la valeur. Le fonds a pris un engagement initial à l’égard des infrastructures, qui devrait être investi au cours des prochains trimestres, mais nous abordons actuellement les autres domaines avec prudence. Comme pour les placements sur les marchés publics, la gestion rigoureuse des prix est au cœur de notre approche.

Les biens immobiliers privés semblent surévalués

L’immobilier privé est un domaine qui nous préoccupe, car nous pensons que des rajustements négatifs des évaluations n’ont pas encore eu lieu. Un « taux de capitalisation » est une mesure du taux de rendement attendu d’un immeuble de placement sur la base des revenus que le bien est censé générer, et ces taux servent globalement de référence pour les évaluations immobilières (plus les taux sont bas, plus les biens sont chers). Les taux de capitalisation reflétés sur les marchés de l’immobilier privé sont actuellement inférieurs de 1 à 2 points de pourcentage à ceux des marchés publics. Nous avons donc du mal à croire qu’ils ne soient pas en train d’augmenter (et donc que les valeurs de ces fonds soient en train de baisser). Si les taux de capitalisation se rapprochaient de ces niveaux, cela pourrait entraîner des baisses de prix à deux chiffres (et cela sans tenir compte de l’effet de levier).

Heureusement, nous avons choisi des partenaires qui ont un état d’esprit similaire au nôtre en matière de placements et qui sont très conscients de la dynamique actuelle du marché. Nous avons récemment eu un appel avec l’un des cogestionnaires de portefeuille principaux d’un fonds immobilier que nous avons approuvé pour le PAF et il a indiqué qu’ils font preuve d’une grande prudence en ce moment. Ils ne souhaitent pas déployer de capitaux dans ce contexte et pensent que des rajustements des évaluations sont également à prévoir. La stratégie n’a pas attiré de capitaux de ses investisseurs potentiels au troisième trimestre et ne prévoit pas en attirer au quatrième trimestre. Ils souhaitent que les évaluations reflètent cette nouvelle situation avant de déployer le capital du fonds, ce qui nous réjouit.

« Comme pour les placements sur les marchés publics, la gestion rigoureuse des prix est au cœur de notre approche. »

Certaines dettes privées semblent plus intéressantes

La dette privée est un autre domaine dans lequel nous avons fait preuve de prudence. Il y a un an, nous avons interrogé de très bons gestionnaires, mais nous avions du mal à nous enthousiasmer pour des rendements sans effet de levier d’environ 6 à 7 %. À l’époque, les produits qui offraient des rendements plus attrayants utilisaient l’effet de levier pour y parvenir (et prenaient donc plus de risques). Nous avons également eu du mal à repérer les gestionnaires qui proposaient des approches réellement différentes. Nombre d’entre eux ont noué des relations étroites avec des acteurs du secteur des placements privés, mais nous avons eu l’impression qu’il s’agissait d’une caractéristique relativement commune à tous les gestionnaires que nous avons interrogés. Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus intéressés. Les rendements ont augmenté de manière considérable et nous avons récemment rencontré une société qui cible un secteur du marché que les sociétés spécialisées en dette privée ont toujours délaissé.

Quelle est la bonne répartition des actifs privés dans un portefeuille?

Cette question est importante et la réponse est « ça dépend ». Compte tenu des contraintes de liquidité, les investisseurs doivent avoir un horizon de placement à long terme et être en mesure de couvrir les besoins de trésorerie intermédiaires par d’autres éléments plus liquides de leur portefeuille. Pour nos clients institutionnels, nous avons tendance à voir des répartitions de 5 à 20 % des actifs. Pour les clients privés qui investissent dans des actifs privés, le pourcentage peut varier en fonction des horizons de placement et des flux de trésorerie individuels, mais se situe généralement entre 10 et 30 %. Les investisseurs doivent être prudents quant au degré d’illiquidité qu’ils peuvent se permettre dans leur portefeuille, car si (quand?) les fonds privés sont réévalués à la baisse, les autres investisseurs risquent de se dépêcher de liquider leurs placements et d’obliger les gestionnaires à fermer les vannes de rachat. Les clients se retrouveraient alors dans l’incapacité de rajuster leur répartition de l’actif pendant cette période de réévaluation de la partie privée de leurs portefeuilles. À long terme, il s’agit d’un aspect naturel des placements dans les actifs privés, mais à court terme, il s’agit d’un risque d’illiquidité important pour les investisseurs.

« Les taux de capitalisation reflétés sur les marchés de l’immobilier privé sont actuellement inférieurs de 1 à 2 points de pourcentage à ceux des marchés publics. Nous avons donc du mal à croire qu’ils ne soient pas en train d’augmenter (et donc que les valeurs de ces fonds soient en train de baisser). Si les taux de capitalisation se rapprochaient de ces niveaux, cela pourrait entraîner des baisses de prix à deux chiffres (et cela sans tenir compte de l’effet de levier). »

Surveiller les liquidations

En temps de crise, les investisseurs qui cherchent à vendre pour obtenir des liquidités ou à rééquilibrer leurs portefeuilles sont confrontés aux contraintes de liquidité des actifs privés, qui peuvent soit ralentir le processus, soit, dans des circonstances exceptionnelles, totalement l’interrompre pendant de longues périodes. Les gestionnaires de placements ont mis en place ces restrictions afin de les aider à gérer efficacement les liquidités du fonds et à faire ce pour quoi ils ont été engagés au départ : déployer ces liquidités dans des actifs susceptibles de ne pas être reconvertis en liquidités avant un certain temps. Nous avons assisté à de telles mesures lors de la crise financière mondiale de 2008-2009 et avons recommencé à les voir en manchettes au cours du second semestre de 2022, lorsque deux fonds immobiliers américains évalués à plus de 85 milliards de dollars américains ont restreint les rachats. Au Canada, plusieurs grandes compagnies d’assurance ont également dû suspendre les contributions et les rachats de leurs fonds immobiliers privés pendant la crise de COVID-19 et la crise financière mondiale. C’est pourquoi les investisseurs doivent veiller à ne pas engager une part trop importante de leur capital dans ces catégories d’actifs illiquides.

Le rappel constant dans notre hall d’entrée du mouton qui se déplace dans le sens inverse des autres est tout aussi pertinent lorsque les investisseurs cherchent à liquider leurs placements que lorsqu’ils s’y précipitent. En tant qu’investisseurs à contre-courant, nous pensons que nos clients investissant dans le PAF sont parfaitement positionnés pour tirer parti de cette incertitude. Si les placements dans les actifs privés paraissaient plus sûrs il y a un an, nous entrons à présent dans une phase qui devrait permettre de créer de meilleures occasions. Les marchés traverseront la période de perturbation qui s’annonce dans le domaine des actifs privés, mais celle-ci sera accompagnée d’occasions pour ceux qui auront la rigueur et la perspicacité nécessaires pour en tirer parti.

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